
La pétillante et passionnée lilloise Amandine Laczewny, créatrice de mode pour la marque House Of Vice (spécialiste du cuir), revient à ses aspirations musicales, sous le tonique pseudonyme Paprika Kinski. Après avoir participé énergiquement à deux premiers projets chatoyants, du punk électronique et sexy des fameux Douglas and The Beauties (2008-2012) ou de la synthpop féminine raffinée des Christ Waddle (2013-2014), elle s’illustre ce coup-ci dans une Pop intimiste, plus luxuriante et délicieusement stylée.
Avec l’aide de deux amis, membres du groupe Okay Monday, Johnny Boom Golightly à la batterie et aux claviers plus du guitariste Aurélien Gainetdinoff, elle transforme le projet en un trio, dont elle mène la baguette, comme une petite fée. Son premier EP « Steady Lover » parut le 25 mars dernier sur le label Her Majesty’s Ship (celui du musicien David Shaw qui la remarqua fin 2014), dévoile quatre pépites entièrement concoctées de ses mains, en de subtiles chansons douces amères, habillées de musicalité envoûtante et karma rebelle.

Dans un premier temps, s’ils s’écoutent avec l’oreille curieusement charmée, les quatre plages abritent des arrangements musicaux si mélodiques et si séduisants, que l’oreille en tombe candidement éprise. « Kids of your crime », qui sonne comme une légère ballade sucrée cache aussi une mélancolie à fleur de peau, qui rend la chanson irrésistible et touchante. La voix d’Amandine, enfantine, n’a rien d’anodin pour parler de l’état du monde dans lequel les enfants grandissent. L’influence de la chanteuse Emily Haines et de son groupe Metric (groupe de rock indie canadien, NDLR), semblera évidente pour les connaisseurs, telle qu’Amandine peut l’afficher parfois dans ses tenues. La ligne de basse insolente qui débute sur « Steady Lover » sert parfaitement la trame sous forme de comptine mi-glam mi-trash, dont l’effet punk électro de la montée finale, en fait le tube instinctif. « Female Trouble », qui évolue dans une ambiance dark électro soft, se démarque des autres titres et renvoie à un style cinématographique, habité de boucles hypnotiques cold wave, vocaux saphiques, proches curieusement de ce que produit aujourd’hui son ex-acolyte de Christ Waddle, Clémentine Antoine, avec son projet de musique synthétique onirique Chevaline.
« Jamaica » est la chanson la plus propice aux plaisirs d’une addiction d’écoute hédoniste. Le rythme tout en percussion caribéenne, sensuelles nappes de synthé, basse tranquille, sonorités exotiques, pop flirtant avec un reggae au féminin et voix caressante nous invitent à la rêverie, à la détente et au bien-être ambiant. La musicalité métissée s’installe dans l’oreille et l’esprit de la même manière que le monoï dans l’odorat du nez posé sur une peau imbibée au soleil. Le programme est érotique, comme en témoigne le clip vidéo :
Avec la parution de ce surprenant EP, personnel, varié, abouti et qui fait beaucoup de bien, Paprika Kinski se démarque naturellement de la scène pop indie actuelle. On ne peut que lui (nous) souhaiter vivement la suite avec un album, ainsi que vous conseillez de vous laisser tenter, voire succomber à la tentation des sensations en l’écoutant.
Juilien Josse
Paprika Kinski sera en concert événement à l’Aéronef le 26 mai 2016 pour le label Night fusionnant Alpage et HMS, notamment au côté de La Mverte & You Man.