
On vous propose un voyage lo-fi folk en mélancolie, en lenteur, en profondeur avec Nicolas Puaux (Narrow Terence, EZ3kiel) et son projet solo.
Laissez-vous porter par [TEREGLIO] dont le premier album ‘Woven Eyelids’ sort aujourd’hui sur les labels Jarane et Araki / L’Autre Distribution.
Echappée belle de l’un des frères fondateurs de Narrow Terence, [Tereglio] propose avec l’album ‘Woven Eyelids’ un lo-fi folk à la neurasthénie assumée, et remet à plat les codes du songwriting en neuf morceaux à l’intimité saisissante.
Si depuis ‘Rumble-O-Rama’, leur dernier opus en date, la meute des Narrow Terence semblait avoir mis en jachère leurs chansons intranquilles, c’est entre autres parce que Nicolas PUAUX – alias [Tereglio] – en profitait pour se lancer dans l’écriture d’une poignée de titres qu’il livre sous un dépouillement quasi-minéral avec ce premier album solo. Ici, la mélancolie fait loi et l’on y joue un éloge à la lenteur, à la
solitude, au vide résonnant. On osera ainsi parler d’un disque hanté. Au fil des neufs chansons qui forment le LP, ce sont en effet les échos d’un passé douloureux, des réminiscences tourmentées incessantes qui nous sont servis au travers de titres spectraux, pensés comme autant de pièces confinées – tantôt caressantes, tantôt suffocantes – mais à l’intimité et la sincérité toujours poignantes.
Nicolas PUAUX apparait déterminé à l’idée de régler ses comptes auprès d’un entourage que l’on comprend proche mais hostile. En usant de formules faussement naïves et authentiquement désespérées, il affronte ses fantômes, panse ses blessures et livre une accusation nécessaire servie par un chant naturellement plus enclin à murmurer qu’à hurler pour se faire entendre.
L’album se déploie sous un instrumentarium limité, quasi-exclusivement composé d’une guitare folk légèrement overdrivée, accompagnée tantôt d’un piano mat et de cuivres feutrés – servis tout en nuances par l’acolyte-ami Patrik LERCHMÜLLER, tantôt par le matériau sonore analogique de Johann GUILLON (EZ3kiel, Zero Gravity). [Tereglio] déroule ses morceaux comme autant de rivières, déconstruisant l’architecture habituelle de la chanson folk sans jamais pour autant glisser dans quelconque complaisance ‘Prog-Rock’. Et l’on chemine alors, glissant de surprise en surprise dans des dynamiques d’orfèvre où craquements, souffles et autres micro-variations finissent par devenir des
événements de taille.
On ressort alors de l’écoute de l’album comme d’une longue méditation les yeux mi-clos, caressé par les mélodies, apaisé par les profondeurs et les silences répondant aux notes, les sens éveillés par la minutie des détails. On s’abandonne à ces blessures chantournées dans des conduits mélodiques purs et sans alambic, le tout interprété avec l’art de l’accident heureux et de la perte de contrôle. Ce faisant,
[Tereglio] prend le risque de patiner ses morceaux d’un vernis anachronique – loin, très loin des productions actuelles où même l’étrange semble maitrisé – et parvient à imposer sans torsion de poignet une écoute continue et immersive de ses pièces musicales, prime accusation contre un adversaire de taille : l’urgence de l’époque.
