
Les légendes du hardcore californien Suicidal Tendencies sont de passage en France. Et ils ne font pas semblant ! Une dizaine de jours au cœur de leur World Gone Mad Tour qui suit la sortie de l’album du même nom. Accompagnés des peu connus Néerlandais de 22 below. Reportage sur deux étapes de cette tournée : Nancy et Reims.
Nancy (L’Autre Canal, le 13/04/2017)
Après avoir profité un peu de la place Stanislas sous le soleil, je prends la direction de l’Autre Canal pour Suicidal Tendencies, la salle de musique actuelle de la ville. Cela fait quatre ans que je ne m’y étais pas rendus (c’était pour voir les punks de NoFX). Le lieu est toujours aussi agréable juste à côté d’un plan d’eau sur lequel s’entraînent des kayakistes. Une fois à l’intérieur, direction la salle pour pouvoir être prêt à dégainer dès que la première partie 22 below sera sur scène.
Je ne connais rien d’eux. J’ai les trois premières chansons pour les photographier et les découvrir. Rapidement, on note que le style tranche franchement avec celui des têtes d’affiche. Un rock nerveux et puissant, certes, mais loin de la folie du groupe de Venise Beach. Les cinq musiciens accompagnent une jeune femme qui nous prend de haut (elle est juchée sur un mur d’enceinte. Elle n’en descendra que pour les deux derniers titres) mais elle ne cherche pas forcément à se prendre pour une diva. Elle se fendra même d’une chanson interprétée en français.
Leur rock est brut, malgré la présence d’un clavier qui se fera discrète. Discret également leur départ du plateau, presque sans saluer après une demi-heure de concert. Cela n’aura pas empêché le public, pas vraiment venu pour ce genre de musique de leur réserver un bon accueil et aux membres du groupe de sembler ravi d’être là.
Place maintenant à Mike Muir and Co
Quatre ans que je ne les avais pas vus sur scène. C’était à Oignies (62) et depuis, il y a eu un gros changement : l’arrivée à la batterie de Dave Lombardo ! Oui, l’ancien membre de Slayer est sur scène et je suis impatient de voir ce que ça donne avec cette formation surtout depuis que je l’ai vu à Lille avec son projet Philm. Dès les premiers titres le public s’agite. Il faut dire que Mike Muir, du haut de ses 54 ans, ne tient pas en place. Arpentant la scène dans tous les sens, frappant l’air comme un boxeur, il est fidèle à mon souvenir.
Les morceaux s’enchaînent déclenchant inévitablement une salve de slams dans la foule. À part trois titres du dernier album (dont « Get Your Fight On ! » dédié à son fils ou le très 1980’s « Clap Like Ozzy »), la plupart des chansons jouées sont puisés dans la discographie lointaine du groupe. Y compris ce « I Shot Reagan » plutôt rare et remis au goût du jour pour cette tournée. Pour le reste, on est en terrain balisé de « Freddumb » à « I Saw You Mommy » en passant par l’inévitable « Possessed To Skate » qui résume le goût du groupe pour ce sport comme le montre leur accoutrement.
Seul « Institutionalized » manque à l’appel
On constate aussi que Dave Lombardo est plutôt discret avec cette formation. Comprendre par là qu’il ne fait pas spécialement étalage de son bagage technique qui fait pourtant sa réputation dans le milieu. Si Muir ne l’avait pas fait se lever pour recevoir une ovation, on l’aurait à peine aperçu derrière ses fûts. Le public est invité sur scène, et notamment un jeune garçon à la tenue idéale pour cette soirée : t-shirt « Suicidal Tendencies » et pull « Slayer » noué sur ses hanches. C’est Lombardo qui a dû apprécier ! Idem pour ce fan qui les voit pour la vingtième fois et qui chantera « War Inside My Head » avec eux.
C’est déjà la fin d’une prestation dense avec une heure et demie passée avec une des légendes du punk dans une ambiance démente ponctué par les slams du public. Le spectacle durera encore un petit peu, car Mike Muir se prêtera gentiment aux demandes de selfies dans les couloirs de l’Autre Canal pendant encore un long moment.
Maintenant, retour à la maison… car ça recommence dans trois jours.
Reims (La Cartonnerie, le 16/04/2017)
Dimanche en fin d’après-midi. Mes vacances se finissent (oui je sais, vous vous en fichez) mais sur le chemin du retour, j’ai entouré ce concert de Suicidal Tendencies dans la cité des sacres. Le dernier en France sur cette tournée qui les a vus traverser l’Hexagone de Nîmes à Brest avec cette petite infidélité néerlandaise (le Paaspop festival). Sur le chemin pour aller à la salle, ce sont les membres de l’équipe technique des Californiens que je croise. Pas sûr qu’ils apprécient la baisse des températures ambiantes. Tant pis, ils n’auront qu’à faire monter la température dans la salle.
On prend les mêmes et on recommence. On retrouve 22 below en ouverture. Juste avant le début du concert un des techniciens des Néerlandais nous demande expressément de revenir à la fin du set, quand la chanteuse « qui est plutôt mignonne » descendra du bord de scène. C’est effectivement une bonne nouvelle. Et pour Suicidal Tendencies, nous aurons même droit d’accéder au balcon pour les photographier.
Le concert en soi est conforme à celui entendu trois jours auparavant en Lorraine
Et même s’il est un peu plus tôt (il est environ 19 h) on est sur le même tempo rapide. Le groupe déroule les mêmes morceaux. C’est parfaitement maîtrisé. Il n’y a là-dessus rien à redire. Ce sont des professionnels qui savent tout de même prendre un réel plaisir à jouer ensemble, y compris pour un public dont on peut douter qu’il les connaisse et surtout dans un style totalement différent de celui de la tête d’affiche.
Cette fois-ci, ils n’oublieront pas de saluer, prenant même la pose. Eh oui, c’est un souvenir pour eux aussi, car ils auront traversé la France pendant dix jours avec Suicidal Tendencies.
L’attente pendant le changement de plateau se fait avec Body Count en fond sonore. Les Nancéiens avaient préféré diffuser Infectious Groove, un autre groupe où officie Mike Muir. Au premier rang, un fan me reconnaît du concert de Nancy. Il y a fort à parier qu’il n’est pas le seul à avoir fait la route ce soir. Et d’autres sûrement ont dû pousser le plaisir jusqu’à rajouter la date d’Audincourt (près de Montbéliard) à leur agenda.
Histoire de savoir si l’on est motivé, de s’assurer que l’on est bien chaud et que l’on se rend tout simplement compte que Suicidal Tendencies va arriver sur scène
Le chauffeur de salle (également préposé à la manipulation de l’étendard maison) tient à nous crier dessus. Et c’est parti pour un spectacle similaire à celui du jeudi précédent, mais toujours si jouissif. Les moments forts sont les mêmes. On notera juste la moindre « fougue » de Mike Muir qui doit être rincé d’avoir enchaîné onze concerts en presque autant de jours.
Diminué peut-être mais toujours fidèle au poste quand il s’agit haranguer la foule. Après les traditionnelles photos autorisées en bord de scène, nous accédons au balcon. Super, je pourrai ainsi avoir une vue plongeante sur la foule et les circle pits qui vont prendre naissance (notamment lors de « Cyco Vision »). C’est dimanche alors Mike Muir nous invite au recueillement du seul culte qu’il observe : le skate (« Possessed To Skate »).
Le public est ravi, mais hésite un peu plus à se ruer sur la scène qu’à Nancy
Par contre, il aime bien y envoyer divers objets. Comme un soutien-gorge qui finira suspendu au pied de micro du bassiste. Mais quand on l’invite à y monter alors là c’est différent. Les spectateurs viennent volontiers (y compris la jeune femme propriétaire du sous-vêtement évoqué qui apparemment voulait quand même le récupérer). Sur scène, les spectateurs aiment se prendre en photo avec les musiciens, certains font de l’air guitar à leurs côtés.
Difficile toutefois d’atteindre le niveau de technicité d’un Dean Pleasants qui, à Oignies, avait même eu droit de présenter quelques titres en avant-première de son album solo à paraître quelques mois plus tard. Aujourd’hui encore, le temps file vite. Toujours pas d’ « Institutionalized » bien qu’il soit inscrit sur la liste des morceaux. Tant pis, on finit le rappel avec un titre du dernier album, « Living for Life » qui permet de constater que malgré le nom du groupe, Mike Muir sait aussi rédiger des textes plus positifs. Un petite jam, ponctué par un court solo de Lombardo et c’est fini.
C’était très sympa de suivre ce groupe que j’apprécie beaucoup à la fois complètement fou, mais en même temps très technique. Les voir dans deux belles salles en si peu de jours étaient une réelle opportunité que je suis content d’avoir saisi. Bon ce n’est pas tout, mais il reste encore de la route à faire et demain… Reprise du boulot !