
Le Splendid de Lille a l’habitude de programmer des groupes de métal. Mais à chaque fois on est surpris par la qualité des formations invitées car certaines sont de véritables légendes du genre. C’est effectivement le mot qui convient pour décrire Fear Factory, les Californiens aux 25 ans de carrière derrière eux.
Initialement c’étaient les Butcher Babies qui devaient ouvrir pour Fear Factory. Leur désistement aurait même incité certains à vendre leur ticket sur les réseaux sociaux. C’est finalement les Valenciennois de SUP (également connus sous les noms Supuration et Spherical Unit Provided) qui s’y collent. Actifs depuis la fin des années 1980 ceux-ci les remplacent efficacement si on en juge les commentaires des fans du genre. On aperçoit effectivement pas mal de gens avec des vêtements affichant leur logo. Si ce n’est pas suffisant pour permettre d’ouvrir les gradins, c’est assez pour rameuter pas mal de monde un jour de semaine pendant le début des vacances estivales.
Le groupe des frères Loez bénéficie d’une bonne cote de la part de la presse spécialisée (comme le montre aussi la biographie qui leur est consacrée, éditée chez Camion Blanc). Avec sa discographie répartie sous trois entités différentes et avec des concepts d’albums fouillés et ambitieux ce concert est assez attendu d’autant plus qu’il revienne d’une bonne prestation au Hellfest le weekend précédent. Musicalement il s’agit d’un métal bien lourd, tendant vers le Doom par moments. Sur la scène, les musiciens paraissent un peu coincés (le matériel de Fear Factory est déjà en place, masqué par des couvertures) mais ils sont tellement concentrés sur leur musique que
cela ne les gêne en rien.
Le rythme est assez souvent lent, mais le quatuor se ménage quelques accélérations bien senties et qui seront d’autant plus notables lors de la seconde partie du set.
Certains titres sont plus faciles d’accès, mais la plupart des titres requièrent une concentration particulière en raison de leur densité. Il faut alors les replacer dans le contexte des concepts albums où ils ont été écrit. On regrettera toutefois le peu de communication avec le public, pourtant largement acquis à leur cause, avec de rares prises de paroles quasiment inaudibles.
Une performance remarquable toutefois.
Elle donne envie de s’intéresser de plus près à ce groupe un peu méconnu du grand public. Après le changement de plateau, un technicien s’improvise chauffeur de salle et s’avance pour annoncer Fear Factory, en provenance directe de Californie. Une introduction surprenante mais qui est dans la lignée du style de communication du groupe américain.
J’avais été averti avant de les voir en concert que le groupe était parfois critiqué pour ses prestations scéniques, notamment le chant clair de Burton C. Bell. Mais rapidement, ces critiques me semblent un peu exagérées, la prestation étant de grande qualité. Mieux que ça même, c’est un des meilleurs concerts que j’ai pu voir au Splendid. La fosse était en délire. Les interventions de Bell, toujours chaleureux contribuent même à faire passer le contact entre le groupe et les fans. Celui-ci est toujours enclin à demander si tout va bien et si on passe du bon temps (et accessoirement à cracher par terre !) pour galvaniser la foule.
Incontestablement la réponse est oui. Les autres musiciens sont à la fête également
Le batteur de Fear Factory, Mike Heller, s’amuse bien avec sa double pédale (sur Powershifter notamment) et le guitariste Dino Cazares prend bien soin d’imiter une mitraillette (sur Martyr). Le set est bien rodé, avec des titres piochés dans les différents albums de la formation de Los Angeles. La musique est un métal étonnamment moderne compte tenu du fait que la formation trouve ses racines dans les années 1980. C’est d’ailleurs avec une attention particulière qu’ils interpréteront Demanufacture, un morceau vieux de 20 ans et dont l’album dont il est tiré fera l’objet d’une tournée spécifique à partir du mois de novembre.
Le calendrier est donc chargé puisqu’ils tournent déjà pour promouvoir leur nouvel album Genexus (dont ils ne joueront que deux titres : Soul Hacker et Promotech) qui sortira début août. Les thèmes de ce dernier album semblent proches des angoisses du groupe inspirées par la science-fiction. Et surtout l’affrontement homme /machine. La ligne indus métal est donc un choix cohérent avec leur thématique et est également constante durant ce concert tout comme l’utilisation de samplers, audibles notamment lors d’introductions de certaines chansons.
Comme il a été dit plus haut, c’est une des meilleures performances de l’année dans cette salle et la preuve aussi que ce groupe parvient toujours à proposer une approche moderne de sa musique et à ne pas tomber dans la facilité.
Nicolas Fournier