
Delvon Lamarr Organ Trio au Grand Mix !
20 heures… Un PAR s’allume à demi feu nous laissant apercevoir dans une ambiance feutrée un magnifique orgue Hammond B-3 et une cabine Leslie, un set drum Ludwig à paillettes et une splendide Fender Telecaster Blonde plugée à un ampli twin reverb à lampes d’époque.
Ça sent à plein nez le matos vintage et la chaleur d’un vinyle du label Stax Records des années 1960. Le décor est planté !!!
Premier morceau et instantanément mes poils se dressent et s’entortillent sur mes avant bras. Les roues phoniques du B-3 tourbillonnent et chantent, malmenées par un Delvon connaissant sa machine sur le bout des doigts et usant de musicalité en s’amusant avec désinvolture sur les tirettes harmoniques Drawbars.
Ehssan Karimi aux baguettes délivre de suite un beat cliqué et binaire calculé par la NASA. Le texan Johnny Moeller a la guitare nous régale avec un jeu simple et blusie. Cocottes et gimmicks distillés s’enchaînent sur des gammes pentatoniques terriblement efficaces. Cinq minutes d’écoute et le constat est simple et sans appel : je déguste un mélange acidulé à la sauce soul-jazz entre un booker T & the Mg’s et un excitant Bayou-funk en mode « The Meters ».

Les nappes d’orgue amenées délicatement à la pédale de volume donnent un bel effet wha-wha naturel. La ligne de basse jouée aux pieds et en chaussettes rappelle une certaine Rhoda Scott qui elle le faisait pieds nus. Les ponts sont envolés à en faire oublier le thème principal, les breaks sont nets et découpés au couteau, intelligemment placés et ne retombent jamais sur un premier temps mais sur le « et » d’un troisième ou quatrième et le batteur nous le rappelle bien d’un air défiguré et souffrant, sur un coup de baguette magique sur un charlet ouvert.
Sur ce set-list de qualité, trois reprises dont un OVNI de belle facture viennent me chatouiller l’oreille comme pour défier l’ordre musical établi.
En apéritif, le mythique « Move one up » de Curtis Mayfield sublimement remanié et remettant au goût du jour, la scène Blaxploitation des années 1970. En plat de résistance, un classique absolu du Godfather of soul, Mr James Brown avec un « Ain’t it funky « progressif amené avec de belles nuances puis culminant à son apogée dans une transe survitaminée.
Pour le dessert, un sorbet dégoulinant de sensualité avec un déroutant « Careless whisper » de George Michael. Déroutant car je pense en premier lieu à une blague privée entre membres du groupe…
Mais non !!!! Delvon reprend le lead très minimaliste de George puis brode une improvisation, un jeu de questions-réponses s’installe entre le clavier et la guitare, harmonisant des tierces et des quintes pour agrémenter un titre solide et lancinant en lui donnant un ton beaucoup plus soul et… c’est un coup de génie !
Delvon Lamarr Organ Trio, un combo soûl-jazz comme il y en avait dans les années 1970, un grand mix à l’écoute et complet et un groupe accessible qui signe des vinyles en fin de concert. Une bonne heure de véritable plaisir, du feeling orgasmique en plongée dans les méandres du groove. Du made in Seattle à consommer sans modération.
Nadia Fertas et Jeff Giannone