Initialement programmé il y a quelques semaines, le dernier spectacle de Fellag, malicieusement intitulé « Bled Runner », est finalement reprogrammé ce mercredi 12 décembre 2019.
Une sorte de cadeau de Noël avant l’heure pour le public local. Un public qui l’apprécie (je l’avais moi-même déjà vu à Avion il y a quelques années) mais qu’il doit décommander régulièrement en raison de son état de santé. Dans les travées du Colisée de Lens, quelques personnes, plutôt âgées, se remémorent d’ailleurs son dernier spectacle, « Petit choc des civilisations » durant lequel il préparait un couscous tout en dévissant sur les différences entre Français et Algériens.
Cette fois-ci, c’est plus une plongée en enfance qu’il opère.
Souvenirs d’une époque où l’Algérie c’était la France, enfin en principe. Il décrit sa première rencontre avec des militaires français (en fait il s’agit… des tirailleurs sénégalais). Il enchaîne avec ses souvenirs d’école où il apprendra successivement que ses ancêtres étaient gaulois, puis Arabes quand des instituteurs affiliés aux frères musulmans seront affectés en Algérie après l’indépendance. Lui qui se croyait simplement Kabyle.
Dans une nostalgie plus tendre qu’attristée, il décrit les grands moments de sa vie et de celle de sa famille. Comme l’origine de son patronyme, créée de toutes pièces par une administration française tatillonne et un peu dépassée par les mœurs locales.
La référence cinématographique du titre n’aura échappé à personne et Fellag lui-même se plongera dans le récit d’une projection du film la Guerre de Troie. Une séance perturbée par le projectionniste qui finit par brancher la retransmission radiophonique d’un match de football directement sur la sonorisation de la salle. À la fin, on ne sait plus si Achille conquiert Troie ou s’il tire le penalty victorieux pour l’équipe locale.
Le public est assez âgé, reflet de la longue carrière du comédien algérien.
Un public avec lequel le courant passe bien et Fellag se permet même de glisser quelques mots arabes, pour le plus grand plaisir des locuteurs de cette langue, avant de les traduire en français. Le spectacle débute juste avant l’indépendance de l’Algérie dans laquelle il a grandi et se conclut par son arrivée en France en 1995. Époque, déjà tourmentée par les attentats terroristes.
Le public apprécie, le temps file vite, au rythme des souvenirs de Fellag. Certains extraits vidéos sont même diffusés sur un écran géant (issus du spectacle « Tous les Algériens sont mécaniciens »). Un vrai régal offert par un artiste rare et surtout un peu plus qu’un spectacle comique qui donne à réfléchir.