Pour son troisième passage dans la métropole, Tricky a choisi le Grand Mix de Tourcoing pour y présenter son nouvel album « Skilled Mechanics » considéré comme un retour aux sources pour l’enfant de Bristol.
Une première écoute de cet opus de Tricky démontrait effectivement que l’ex-Massive Attack avait encore de la ressource pour produire des albums de qualité. Et même quelques chansons de la trempe d’un « Overcome » pour séduire son public.
Mais avant cela, on profite de cette fin de dimanche après-midi pour voir le groupe français Shuffle présenter son nouvel album. Ce quintette a un univers assez éloigné de celui de la tête d’affiche, malgré ses deux claviers et sa basse omniprésente formant un fond sonore comparable à celui du trip-hop de l’anglais. Le point commun s’arrête là.
L’ensemble est plus à chercher du côté de la vague néo-métal apparu lors des années 1990 (comme le trip-hop, je vous l’accorde) dans la lignée de Staind et surtout d’Incubus. La voix du chanteur de Shuffle étant assez proche de celle de Brandon Boyd d’ailleurs. D’abord lent, les titres s’accélèrent par la suite. Une petite reprise au passage (« Roxanne » de Police) montre que les musiciens maîtrisent leur sujet. Ils se donnent d’ailleurs à fond et finissent par le titre « Crazy » durant lequel ils invitent le public à se rapprocher. Une très bonne entame.
Le public s’est rapproché de la scène…
tandis que les enceintes du Grand Mix diffusent du trip-hop histoire de nous mettre dans l’ambiance. La question est maintenant de savoir quelle va être la prestation de Tricky ce soir. L’exercice est parfois périlleux, il était même apparu plutôt apathique l’an passé à l’Aéronef. Il arrive enfin, dans une déco minimaliste (il n’y a presque pas de lumière d’ailleurs) et seulement accompagné d’un batteur et d’un guitariste.
L’an passé une choriste venait l’épauler (et même se substituer totalement à lui), ce soir il faudra compter sur des play-back. Cela n’enlève rien à la qualité première de Tricky : être un compositeur hors pair. Et surtout, se baser sur un magnétisme sur scène sans égal. Après nous avoir tourné le dos pendant les deux premiers titres, il se saisit enfin d’un micro (et même d’un deuxième). Beaucoup plus concerné qu’un an auparavant il interprète ses chansons avec conviction. Il puise principalement dans ses trois derniers albums (Skilled Mechanics, Adrian Thaws et False Idols). Seul l’inévitable « Overcome », issu de sa première sortie discographique, est convié à la fête.
Pour le reste Tricky est fidèle à lui-même.
Une clope allumée à la bouche (à moins que ce ne soit autre chose, oui, c’est sans doute autre chose) il déambule comme possédé sur la scène. Chantant alternativement dans les deux micros mis à sa disposition (et parfois chantant à côté) comme dans un état second. Mais la magie opère. L’auditoire paraît captivé. Aussi bien par la musique que par la simple présence de ce compositeur de génie. Le concert sera court (une heure 20) mais avec suffisamment d’éléments pour le rendre vivant. La fin de la première partie du set est des plus intéressantes. Alignant successivement « My Palestine Girl« , « Valentine » (avec son sample de la chanson de Chet Baker) et de conclure par une version longue de « Sun Down« . Le public en redemande légitimement.
Ce sont les notes du Feeling Good de Nina Simone qui sonnent le rappel de l’enfant de Bristol. Deux nouveaux titres, parmi les meilleurs de Skilled Mechanics, sont joués : « Boy » et « Beijing To Berlin ». Entre les deux, il jouera sa reprise de « Do you love me now ? » des Breeders. Et comme final, c’est « Vent« , qui conclut généralement les concerts de Tricky, qui est logiquement interprété. Plus de dix minutes pour se dire au revoir. En espérant le revoir bientôt, aussi concentré sur son sujet.