Rodolphe Burger « Le Cantique des Cantiques et Hommage à Mahmoud Darwich ».
28 août 2022, Cathédrale de Tournai – Festival « Rencontres inattendues ».
Musicien génial et inclassable, Rodolphe Burger accompagné de Julien Perraudeau (basse, clavier), Mehdi Haddab (oud), Yves Dormoy (électro, clarinette), Ruth Rosenthal (chant) et Rayess Bek (chant) ont donné dimanche 28 août un concert remarquable autour du Cantique des cantiques et de la poésie de Mahmoud Darwich à la Cathédrale de Tournai dans le cadre du Festival « Rencontres inattendues ».
Un moment fort, d’une intensité rare, sur une scène érigée dans la Cathédrale de Tournai avec la venue de Rodolphe Burger, fondateur du groupe Kat Onoma dans les années 1980. Proche d’Alain Bashung, il a mis en musique, pour le mariage de ce dernier avec Chloé Mons, une version contemporaine d’un texte du Nouveau Testament, Le cantique des cantiques, nouvellement traduit par Olivier Cadiot. Des mots d’amour intimes, intacts et bouleversants, des mots bibliques, tout droit sortis de ce texte, sont sortis en hébreu de la bouche de Ruth Rosenthal, puis en français de celle de Rodolphe Burger, rendant un vibrant hommage à son ami musicien disparu en 2009.
Il a ensuite complété ce morceau par un hommage au palestinien Mahmoud Darwich et à son texte Et s’envolent les colombes, un psaume d’amour et de spiritualité, à la fois poétique et laïque, à l’évidence une « réponse » arabe au Cantique.
Pour ce concert, Rodolphe Burger a donc réuni deux poèmes d’amour dans lesquels se mêlent plusieurs langues (hébreu, arabe et français) pour trois belles voix profondes et envoûtantes qui résonnent encore dans nos têtes. Les claviers, l’oud, la clarinette, rehaussés de touches électroniques sont venus consolider l’expression de la guitare et du chant de Rodolphe Burger.
Sur un écran est apparu le poète palestinien Mahmoud Darwich, disparu en 2008. Filmé par Jean-Luc Godard, il dit : « Un peuple peut-il être fort sans écrire de poésie ? ».
Et sur scène, c’est l’oud ondulant de Medhi Haddab qui répondit.
« S’envolent les colombes, se posent les colombes ».
Le magnifique poème de Mahmoud Darwich sonna en hébreu, en français et arabe. Les voix s’entremêlèrent. Le voyage pouvait commencer. Un trip de près de quarante minutes où trois voix se répondirent, en trois langues, le français de Burger, l’hébreu de Rosenthal et l’arabe de Darwich, dit par le libanais Rayess Bek.
La guitare sylphide de Rodolphe Burger et l’oud de Mehdi Haddab résonnèrent et épaulèrent la poésie. On fermait les yeux et on frissonnait tout au long de ces paroles étirées, on se laissait emporter par ces vagues d’intensité, Burger trouvant une ligne mélodique simple, mais forte, pour accompagner le leitmotiv « S’envolent les colombes, se posent les colombes » qui revenait de façon régulière.
Par cette performance artistique forte, d’une grâce infinie, Rodolphe Burger a mis en miroir deux magnifiques poèmes, deux chants d’amour intenses, suaves, subversifs et tendres, une chanson d’amour entêtante chantée à trois voix (Rodolphe Burger- Ruth Rosenthal – Rayess Bek) rendant alors un magnifique hommage à ces deux grands poètes que sont Darwich et Cadiot.
En sortant, on se demande quel don détient Burger pour provoquer si bien l’alchimie de l’émotion et cette fusion parfaite, éblouissante, entre la musique et les mots des poètes. Nous nous sommes abandonnés à écouter et à ressentir de tout notre être cet hymne à l’amour et à la paix, magnétique et ensorcelant. Merci Monsieur Burger.