
Le savez-vous ? Les médiathèques modernes sont des lieux incroyables où régulièrement il se passe des choses improbables pour ceux qui pensent que l’on ne fait que lire en silence ou emprunter des livres poussiéreux. Ce 29 octobre, celle du Cateau-Cambrésis avec l’aide de la Médiathèque départementale du Nord a préparé une soirée spéciale autour de David Bowie.
L’association Heures Exquises – Centre Internationale pour les Arts Video , qui était de la partie, avait le bon filon, la bonne personne : Laurent Rieppi, le fameux présentateur de Classic 21. En mode conférencier, il sait tout sur Bowie et bien d’autres artistes, une Vivat pour déguster l’avant-conférence, un pont avec Jacques Brel, il n’en fallait pas plus pour séduire l’ensemble des usagers jusqu’à 23h passé !!! Un beau service public.
Sylvain
D’où est venue cette passion de la musique ? Est-ce que tu as un souvenir d’enfance qui te vient à l’esprit ?
Laurent Rieppi
Oui, oui. C’est clairement Queen. Quand j’avais 6/7 ans, j’ai commencé à les écouter avec mon grand frère et ça a été une révélation pour moi en fait. J’ai vraiment adhéré complètement à l’ensemble de la discographie de Queen. Je suis né en 1980, donc, on était vers 1986/1987, juste un peu après le fameux concert de Wembley . Puis j’ai suivi le cheminement de Queen avec la sortie de l’album The Miracle et Innuendo. J’ai vécu aussi, à l’âge de 11 ans, la mort de Frédéric Mercury, qui m’avait vraiment profondément touchée.
Ben parfois, ma mémoire est un petit peu floue par rapport à ce moment-là, mais je me rappelle que l’on m’a expliqué que des mamans qui venaient chercher leurs enfants à l’école étaient inquiètes de voir qu’il y avait un jeune garçon de 11 ans qui était dans la cour de récréation qui semblait très triste le jour de la mort de Freddy Mercury. Je m’étais mis de côté, j’étais vraiment en deuil. C’est vrai qu’en y repensant ça a été un vrai choc.
Ce qui est bien avec Queen, c’est que ça m’a ouvert énormément de portes. Premièrement celle de David Bowie avec le titre “Under Pressure” donc peut-être pas à l’âge de 6/7 ans, mais en grandissant je me suis intéressé à lui : « Tiens c’est qui ce Monsieur qui chante avec Queen ? » Et j’ai commencé à découvrir sa discographie.
Puis de David Bowie, j’ai commencé à écouter pas mal de musique des années 1970. J’ai commencé à écouter aussi pas mal de Hardrock des années 1970 comme Black Sabbath et Deep Purple, ce genre de choses. Puis Bob Dylan, puis du Folk. Là, j’étais vraiment à l’âge de 15/16 ans, ce que j’appellerais parce qu’on parle justement de médiathèque : « J’étais un rat de médiathèque ». Je passais ma vie dans les médiathèques. Je louais des disques tout le temps et à ce moment, on enregistrait les disques, on n’avait pas beaucoup de moyens, sur des CD vierges, des cassettes et on constituait en fait une espèce de bibliothèque géante chez moi, de tout et j’étudiais de tout, de façon très précise, en étant aussi dans cette génération qui a connu les débuts de l’internet. Ça m’a permis d’aller sur des sites, par exemple allmusic.com. C’est un site qui a été vraiment une référence pour moi qui permettait en fait que je découvre un groupe. Puis regarder quel style c’était : je cliquais sur le style et de là en fait, j’ai commencé à découvrir pas mal de groupes.
C’était une espèce de gigantesque arbre généalogique de la musique rock pop. J’étais à fond. J’étais conseillé par des profs quand j’étais en école secondaire qui étaient fans de rock aussi et de là, en fait, j’ai commencé à lire énormément de biographies, ce genre de choses et puis j’ai décidé d’en faire mon métier plus tard.
Sylvain
D’accord, mais donc tu étais en mode consommation de musique en tant que fan et à quelle période : à quel moment justement es-tu passé acteur ? Partager cette passion de la musique avec les autres, si tu peux parler aussi des différentes manières dont tu as pu partager cette passion, on te connaît par Classic 21, mais est-ce qu’il y a eu d’autres choses avant ?

Laurent Rieppi
Oui, absolument. Je pense que déjà de base, la musique, c’est quelque chose qui se partage. C’est-à-dire que quand j’étais adolescent, on n’a pas beaucoup de moyens, alors avec un pote, à l’époque, un achetait un album ou l’autre achetait un autre parce que c’était cher et on écoutait dans la chambre de l’un ou l’autre pour découvrir cette musique et découvrir plus de styles et rapidement je me suis rendu compte que je passais pas mal de disques dans la cour de récréation. Donc ça donnait une sorte de mini club de gens qui étaient intéressés par la musique et de gens qui voulaient en savoir plus.
À l’âge de 15 ans, j’ai commencé dans une radio très locale dans la région Liégeoise. C’était une émission qui s’appelait les dinosaures, c’était les dinosaures du rock en fait, on a commencé à passer Led Zeppelin, Deep Purple, ce genre de choses mais aussi, ce qui à ce moment-là était nouveau Nirvana puis Foo Fighters, Offspring ce genre de chose au milieu des années 1990 donc et là ça j’ai bien aimé le média. Enfin, j’ai toujours aimé le média radio parce qu’enfant, je passais mon temps à essayer d’écouter les radios qui étaient très lointaines, genre sur les ondes longues moyennes pour écouter parler dans d’autres langues. Ça me fascinait quand j’étais enfant et donc j’utilisais ce média-là pour partager ma passion.
Au bout de quelques années, donc, dans cette radio très, très locale et très très amateur, j’ai commencé à faire des études de communication, j’ai fait de la radio dans l’école. C’était une radio en milieu scolaire. Puis j’ai été aussi dans une radio qui s’appelle Équinoxe, dans la région de Liège. De là, j’ai commencé à faire des stages pour mes études en communication et puis j’ai débarqué à Radio 21, l’ancêtre de Classic 21 aux environs de 2000/2001. J’ai pris contact avec Marc Ysaye, qui était le référent de cette musique à ce moment-là.
Là et très vite en fait. Après mon stage, il m’a engagé comme pigiste. Donc ça veut dire que j’étais payé pour programmer son émission quand il n’était pas là.

Sylvain
Tout de suite tu as été attiré par le média vocal, on va dire plutôt que le média écrit où tu partageais ta passion à l’écrit aussi ?
Laurent Rieppi
J’ai partagé à l’écrit aussi. Dans la fin des années 1990, début 2000, j’ai créé un site internet Classic- rock.be. En fait, il regroupait des news sur tout ce qui était Classic rock comme on dit et aussi des articles de fond. Pour faire ça, au début j’étais tout seul, puis j’ai commencé à avoir des rédacteurs qui venaient de France, de Suisse, Québec et l’on avait une petite structure qui fonctionnait comme ça. Cette structure, en fait, c’était la base de ce qui est devenu par la suite le journal du Rock sur Classic 21. Ça a été repris sous cette forme plus tard.
Donc ça a été un petit peu ma carte de visite pour entrer à Radio 21 et après chez Classic 21. De fil en aiguille, j’ai participé à Radio 21 de 2001 à 2003. Cette même année, j’ai eu un premier contrat pour la création de Classic 21 étant donné que ça n’existait pas encore. Donc, disons que j’étais à Bruxelles avec Marc Ysaye et d’autres personnes pour mettre en place la nouvelle chaîne en 2004, le premier avril.
Sylvain
Tu es boulimique de musique. Tu es dans Classic 21, tu fais des tournées actuellement de médiathèques et d’autres structures où tu interviens. Comment tu réussis à gérer ça ? Qu’est-ce qui te pousse ?
Laurent Rieppi
J’ai deux temps pleins, en fait, c’est vrai que je travaille à temps plein pour la RTBF. Aussi en partie pour l’enseignement, j’enseigne en haute école la culture musicale, parce que ça me passionne aussi d’être en contact avec des jeunes qui ont 20 ans qui sont à la recherche de repères musicaux. C’est vraiment super pour échanger avec eux. Ça c’est vraiment chouette. Voilà, outre ça, l’enseignement, effectivement, j’ai écrit pas mal de bouquins déjà sur l’histoire du Rock : Bowie, Lou Reed, Nick Cave et Rock’n’Roll Attitude que j’ai cosigné avec ma collègue et amie Fanny Gillard, qui est plus global.
C’est toujours une séquence de Classic 21 et puis effectivement, je vais un peu partout. Je propose des conférences, concerts, je propose des conférences comme ici en fait, c’est ma vie, c’est ce qui m’anime tant que j’ai une énergie pour. Je voyage beaucoup aussi par rapport à ça.
Sylvain
Tu continues à apprendre des choses ?
Laurent Rieppi
Je suis certain que j’apprendrai jusqu’à la fin de ma vie.

Sylvain
Beaucoup de personnes pensent que la musique va mourir en tant que matériel dur : le disque. Qu’est-ce que tu en penses ?
Laurent Rieppi
Je suis attaché au support, je suis un peu un collectionneur donc j’ai beaucoup de vinyles, CD et cassettes chez moi. En parlant justement avec nos étudiants qui ont 20 ans. Je ne suis pas sûr que le support va mourir parce que pas mal d’étudiants sont encore intéressés au vinyle à 20 ans, donc ça, ça donne quand même un peu d’espoir par rapport à cette problématique.
Puis finalement, c’est super de s’intéresser au streaming, je suis inscrit aussi à des sites de streaming. Je suis abonné à ce genre de choses. On oublie que si un jour on arrête tout ça pour telle ou telle raison. Si on a plus le support, on a plus de musique donc ce n’est pas possible à envisager, donc il faut le support.

Une soirée pleine de surprise au point d’avoir un autre invité de marque venu pour les histoires de Bowie. Le musicien Zak Perry, grand guitariste Texan dont le rock sudiste résonnera le 14 octobre au Elfes Fest de Dourlers était présent.