
Dimanche de veille de vacances. Direction la Condition Publique à Roubaix, où l’ancienne usine accueille à nouveau l’une des pointures du post-rock : les Montréalais de Godspeed You ! Black Emperor.
Après une petite infidélité à cette salle il y a deux ans (ils avaient joué à l’Aéronef), ils sont de retour dans l’ancienne manufacture aujourd’hui laboratoire culturel. C’est la deuxième étape d’un parcours post-rock après Mogwai le mercredi précédent et avant pg. Lost le lendemain.
La soirée (pardon, l’après-midi ) commence avec la Norvégienne Mette Rasmusssen. La saxophoniste s’avance seule et propose immédiatement des compositions expérimentales. C’est strident, très technique, globalement abscons. La jeune femme semble chercher à produire l’ensemble des sons possibles avec son instrument. Elle fait étalage de ses compétences devant un public circonspect. Elle n’utilise presque pas d’effets, ou alors par des moyens détournés (un vibrato qu’elle réalise en collant son saxo contre sa cuisse, un gobelet utilisé en guise de silencieux).
C’est tout de même très bizarre. D’ailleurs, à coté de moi, mon voisin préfère se replonger dans sa lecture et au fonds de la salle, accoudé au bar, on boit sa bière avec interrogation. La prestation est toutefois intense. La jeune instrumentaliste, hurle, s’agenouille et se contorsionne comme un Jimi Hendrix des beaux jours. Son dernier morceau ressemble fort à l’hymne américain, également reprise par le guitariste star. Une prestation de trente minutes étonnante ou éprouvante selon les points de vue.
Godspeed You Black Emperor : une musique planante et intense mais clivant
Après vingt minutes de pause, la musique reprend ses droits avec la diffusion d’un son lancinant retentissant dans la salle. Les musiciens de Godspeed You ! Black Emperor entre l’un après les autres sans un mot (ils ne parleront pas le long du concert). Place à un rock tendu à la structure complexe et très exigeante. Il s’agit d’une musique extrême dans sa conception et soutenue par des créations visuelles projetées en direct.
Le groupe joue en cercle autour de ses caissons de retour et d’effets posés à même le sol. Tournant presque le dos au public, avec lequel de toute façon il ne communique pas. Les quatre guitaristes (!) façonnent un mur de son tandis que les vidéos laissent place à interprétation comme ces passages urbains enneigés (Anthem Fo no State). C’est tellement captivant que mon voisin à renoncer à lire son livre pour les écouter.
Le reste du public, en tout cas celui qui n’est pas échaudé par l’exigence du propos ni par l’absence de communication, reste attentif pendant les presque deux heures de leur prestation. Une prestation à laquelle se joindra pour deux titres Mette Rasmussen qui trouvera sa place presque naturellement dans l’ensemble.
C’est déjà la fin
Il est tout juste 22h, les musiciens quittent la scène discrètement. La prestation fut longue, éprouvante nerveusement (quelques départs avant la fin sont à signaler) et d’une exigence rare à l’heure actuelle. Le groupe ne cherche visiblement pas à attirer des foules plus larges. Les fans présents (il faut avouer qu’il faut connaitre et être initié) seront sortis ravis par cette nouvelle claquée repoussant la frontière du rock.
La liste des morceaux joués par de Godspeed You ! Black Emperor